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Marées – Sara Freeman

L’histoire d’une fuite, d’une solitude, d’un anonymat. Suite à un drame, Mara se retrouve dans une ville inconnue, comme au hasard, et vit au jour le jour. Un roman construit en une mosaïque de textes courts, d’impressions qui, se succédant, apportent quelques éclaircissements sur le passé et les pensées de l’héroïne.

« Quand elle était enfant, elle aimait les histoires de transformation, de rédemption, de réinvention façon Pygmalion. Dans ces histoires, une fois le nouveau moi façonné, l’ancien est vaincu, il ne traîne plus dans les parages à longueur de temps en menaçant de revenir dans chaque geste, dans chaque rêve, dans chaque lapsus.

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L’hiver ensorcelé de Moomin – Tove Jansson

Les Moomins sont, à coup sûr, mon premier coup de coeur littéraire, les premiers romans lus dont j’ai gardé une sensation intacte.

Quel bonheur que de les re-re-redécouvrir grâce à ce magnifique travail de réédition au Lézard noir. (ICI)

L’univers de Tove Jansson est absolument merveilleux tant par son écriture que par les personnages peuplant sa Vallée. Sans oublier son sublime coup de crayon. Imagination au pouvoir, nature indomptable, gentillesse et parfois, des situations ne connaissant pas de dénouement favorable, comme dans la vraie vie. Je sais que Tove Jansson, tracassée par l’arrivée de la seconde guerre mondiale, a voulu créer un monde à elle, plus beau que le nôtre, et le pari est réussi haut la main car il est bien inconfortable de tourner la dernière page de chacun de ses livres.

 » Toute la Vallée ressemblait à un paysage lunaire et capricieux. La neige faisait de grosses bosses rondes, ou alors de jolis coteaux arrondis d’un côté et de l’autre coupés net comme par une lame de couteau. La moindre brindille avait un chapeau blanc. Et les arbres avaient l’air d’énormes pièces montées en meringue, conçues par un pâtissier farfelu. »

Il y a plusieurs mois, j’avais relu « Papa Moomin et la mer », au style littéraire incomparable.

« Pendant que Moomin avançait au ras du sol et s’enfonçait de plus en plus profondément dans le bois, l’horrible sensation d’être enfermé le quitta. Il se sentit au contraire protégé au cœur de cette fraîche obscurité, il était juste un petit animal qui s’était caché pour avoir la paix. Soudain il entendit de nouveau la mer, et le soleil vint à sa rencontre, chaud, éblouissant. Moomin était arrivé dans une clairière au milieu du fatras des petits arbres. Elle était toute petite, à peu près comme deux lits posés côte à côte. Il y faisait chaud, des abeilles bourdonnaient au-dessus des fleurs et la forêt montait la garde autour. Le feuillage des bouleaux nains se balançait au vent, formant un toit léger que le ciel pouvait percer. C’était une merveille. Moomin avait rencontré l’absolu. Personne avant lui n’avait pénétré jusqu’ici. Cette clairière était la sienne. » 

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Les déferlantes – Claudie Gallay

Je l’ai déjà lu une fois, lors de sa sortie, et j’en gardais une excellente impression, faite d’ambiance maritime sur un rythme lent. En effet, le rythme est lent et, malgré mon amour pour la lenteur, je l’ai trouvé parfois un peu trop tiré en longueur. De plus, les phrases courtes contribuent à créer une sorte de monotonie. Et comme il y a un mystère, on crie un peu : « allez, accouche ! » Très bon livre malgré tout 🙂

« Arrivés à la grande falaise, on a quitté le sentier et on a pris entre les fougères, des passages étroits bordés de ronces. Des buissons ras sur quelques mètres et les ronces ont laissé place à une petite herbe brûlée par les vents. Un à-pic vertigineux. La mer était tout en bas. J’étais souvent venue là, pour oublier. »

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Mauvaise pente – Keith Ridgway

Il pleut, en Irlande. Il pleut sans discontinuer, et le moral des troupes est au plus bas. La vie de Grace Quinn dérape salement. Étrange livre que celui-ci, trouvé au fond d’une boîte à livres. Car si l’écriture est très belle (par moments même superbe), j’avoue m’être demandé pendant très longtemps quel était son propos. Du coup, c’est un « sans plus » pour moi, mais il se pourrait que je sois passée à côté de quelque chose.

« Ensemble ils avaient arpenté la terre détrempée, ils avaient peiné sur la bruyère et les taillis près du lac. Ils avaient parlé, et parlé encore. De quoi, il ne savait plus. Il ne se rappelait que le chemin. Leurs pas, ses pieds qui se posaient l’un après l’autre pour le porter sur un sol toujours neuf, au bord de l’eau, dans l’herbe haute ou sur l’herbe rase, jusqu’au sommet d’une colline. Il se rappelait l’impression que lui procurait la distance parcourue, la sensation sécurisante de se savoir éloigné de tout être humain, excepté sa mère. »

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Un tout petit monde – David Lodge

Existe-t’il au monde un plaisir littéraire plus grand que celui de se plonger dans un bon David Lodge ? A mon sens, non. On se love dans un monde connu : le monde universitaire, avec ses colloques, ses chassés-croisés amoureux, le tout sur fond d’ironie grinçante. Un régal, quoi.

« – Je n’aurais jamais imaginé que vous aimiez courir.
– Ce n’est pas de la course, Percy, c’est du jogging. La course est un sport. Le jogging, une punition. »

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Jenny – Sigrid Undset

« Jenny », c’est le portrait d’une jeune femme qui quitte sa Norvège natale pour rejoindre Rome, où elle se consacre à la peinture et découvre une bande d’amis ayant les mêmes projets, ainsi que la beauté chaleureuse de la ville. C’est le portrait d’une jeune femme qui, au tout début du 20ème siècle, s’interroge beaucoup sur ce que la société attend d’elle, en complet décalage avec ses aspirations.

« L’amour était venu, lent et presque imperceptible comme ce printemps du Sud. Tout aussi égal, tout aussi sûr, sans rien de brusque, sans journées froides ni tempêtes. Le coeur n’était pas ravagé par la nostalgie du soleil, de la lumière éblouissante, de la chaleur torride de l’été. Les soirs ne ressemblaient en rien aux longs soirs du printemps nordique, alors que l’angoisse semble émaner de la clarté insolite, de l’interminable crépuscule. La journée de soleil finie, la nuit tombait douce et égale. La fraîcheur suivait l’ombre, invitant au sommeil paisible et tranquille. La chaleur augmentait un peu chaque jour ; chaque jour quelques fleurs nouvelles s’épanouissaient dans la campagne verte, verte non pas plus que la veille, mais un peu plus que la semaine précédente.
L’amour qu’elle éprouvait était venu ainsi. »